
Séminaire de jeune chercheur « La gouvernementalité européenne : pratiques et débats »
Présentation
L’Initiative Europe organise un séminaire de jeunes chercheurs consacré à la « gouvernementalité européenne ». À partir du concept forgé par Michel Foucault, il s’agit de proposer une généalogie des pratiques politiques européennes qui s’intéressera aux institutions, aux mécanismes, aux procédures, aux savoirs – c’est-à-dire aux « stratégies » – « qui permettent d’exercer cette forme bien spécifique, bien que complexe, de pouvoir, qui a pour cible principale la population, pour forme majeure de savoir, l’économie politique, pour instrument technique essentiel les dispositifs de sécurité » (M. Foucault, 2004).
Conformément aux ambitions de l’Initiative Europe, ce séminaire entend étudier le champ des relations de pouvoir en Europe dans une approche interdisciplinaire favorisée par la polysémie du concept foucaldien. Dans la première définition du terme, la « gouvernementalité » désigne en effet le processus historique d’affirmation du gouvernement sur tous les autres formes de pouvoir. Il sera ainsi possible de s’intéresser aux différentes expériences d’intégration européenne depuis le traité de Westphalie jusqu’à nos jours et d’évaluer les étapes successives de la construction européenne dans une démarche historiciste mesurant le degré d’étatisation des institutions politiques continentales. De manière plus large, le recours au concept de gouvernementalité doit surtout encourager le croisement des approches philosophiques, littéraires, historiennes ou géographiques afin de dégager les théories, les stratégies et les techniques qui sous-tendent l’action publique en vue de « gouverner les individus ». En replaçant la dimension agonistique des relations de pouvoir au cœur de l’analyse des mécanismes de domination et de contrôle, le concept de gouvernementalité autorise effectivement une épistémologie de l’action collective qui interroge les modalités du « faire ensemble » européen. À côté d’une démarche historique purement descriptive, il s’agira donc d’analyser la manière dont les institutions et les acteurs mettent en œuvre un art de gouverner entendu au sens foucaldien de « conduite des conduites ».
Pour ce faire, l’Europe contemporaine est un objet d’étude parfaitement adapté car le projet politique des « pères fondateurs », attachés à une conception ordo-libérale de la société et partisans du desserrement de l’emprise de l’État, semble fondé sur la nécessité pour les institutions européennes « d’organiser » la conduite des citoyens, tout en accordant une large autonomie décisionnelle à chaque sujet politique. En sondant les doctrines de gouvernement et les technologies de pouvoir des institutions européennes, en évaluant la place des citoyens, des communautés et des instances communautaires dans le processus de la prise de décision, ce séminaire cherche donc à évaluer la « gouvernementalisation » de l’Union européenne en s’interrogeant sur sa capacité à faire émerger une nouvelle dialectique politique qui, entre coopération et résistance, entre solidarité et rivalité, remodèle l’art de gouverner au XXIe siècle.
Axes de recherche
Fort de l’interdisciplinarité de l’Initiative Europe, ce séminaire entend faire dialoguer les démarche épistémologiques de chaque discipline afin d’étudier les modalités de gouvernement mises en place par les institutions européennes et l’attitude de la société civile entre acceptation, coopération, adaptation ou rejet. Sans s’y limiter, les communications se structureront autour de cinq axes majeurs :
- les institutions européennes et leur « art de gouverner » ;
- la paix en Europe (approche historique et étude des mécanismes de conservation et de renégociation de la paix à l’échelle continentale) ;
- l’écologie en Europe (politiques européennes, participation/incitation/résistance des organisations non-gouvernementales et des citoyens, etc.) ;
- l’influence des lobbys dans le gouvernement européen ;
- l’Europe de la défense.
Programme prévisionnel
Les séances se dérouleront dans les locaux parisiens de Sorbonne Université (Salle G073 - escalier E). Une retransmission par visioconférence est également prévue. Les séances du 13 novembre et 9 avril seront suivies d’un moment de convivialité en Sorbonne.