Casanova européen : 1725-2025

  • Du 02 avr. 2025 au 04 avr. 2025

  • 09:00 - 17:15

  • Europe des Lumières
  • 02 et 03/04 : Maison de la recherche de Sorbonne Nouvelle, salle Athéna

    04/04 : Maison de la recherche de Sorbonne Université, amphithêatre Molinié

  • Jean-Christophe Igalens

La parution des premières éditions de l’Histoire de ma vie fondées sur l’étude du manuscrit autographe a permis, au cours de la décennie écoulée, une réévaluation importante de la place de l’écrivain Casanova dans les littératures française, italienne, allemande et plus largement européennes. Le tricentenaire de la naissance de Giacomo Casanova est l’occasion de faire un bilan des travaux qui ont accompagné cette transformation et de dégager les perspectives nouvelles de la recherche.

Au-delà de ce nécessaire état des lieux, le colloque s’attache à la figure plurielle d’un Casanova européen. Si ce choix fait partiellement écho au titre de la belle exposition vénitienne qui marqua le bicentenaire de la mort de Casanova (Il mondo di Giacomo Casanova. Un veneziano in Europa [1725-1798]), il tient surtout aux bouleversements connus, depuis cet anniversaire, par les représentations de l’Europe et l’idée européenne, au passé et au présent, ainsi qu’à la nouvelle attention accordée à l’œuvre de l’écrivain.

Européen, l’homme Casanova le fut à l’évidence : par ses voyages, son rapport à l’espace et aux identités, ses réseaux de sociabilité, par l’imaginaire et la mémoire littéraire, par un dialogue constant avec les idées et les œuvres de l’Europe des Lumières. Casanova adapte en italien un livret de Cahuzac pour le théâtre de Dresde, traduit l’Écossaise pour un théâtre de société en Italie, s’efforce de débattre avec Voltaire autant qu’avec Amelot De la Houssaye lorsqu’il réfute l’Histoire du gouvernement de Venise du second. Plus tard, il tente de devenir entrepreneur de théâtre en faisant venir à Venise une troupe de comédiennes et comédiens français ; lorsqu’il traduit l’Iliade en adoptant le vers de l’Arioste, il entend aussi dialoguer, par ses commentaires, avec les œuvres d’Alexander Pope et d’Anne Dacier ; écrivant une histoire des troubles de la Pologne, il évoque avec une acuité rare les rapports de force entre puissances européennes. L’Histoire de ma vie, écrite dans un château de Bohême, ressuscite une enfance vénitienne, la découverte des théâtres de Paris, une certaine qualité de la lumière en Russie, un duel contre un adversaire noble dans la campagne polonaise, le souvenir d’une danse espagnole ; en pleine décennie révolutionnaire, elle donne à rêver une Europe des routes et des auberges, des plaisirs et des amours, dans un français d’Italien cosmopolite nullement intimidé par les puristes qui étouffent la langue en prétendant la protéger des influences étrangères.

Après la mort de Casanova et avec la publication – en allemand d’abord- de l’Histoire de ma vie, naît un autre Casanova européen à propos duquel beaucoup reste à faire : nous n'avons, par exemple, peut-être pas encore pris l’exacte mesure des effets de réception produits par la temporalité différente de la publication de ce qu’on appelle alors les Mémoires dans les espaces germanophones (où l’on accède assez vite aux derniers tomes, ceux où se dévoile un Casanova plus âgé et moins fringant, revenant souvent sur ses pas) et francophones (où l’écart temporel entre la publication des premiers et des derniers volumes « Laforgue » est plus important). Plus généralement, l’histoire de la diffusion et des traductions européennes des Mémoires mérite de retenir l’attention. Casanova européen est ainsi une figure plurielle, mais à propos de laquelle peut aussi se poser la question d’un imaginaire européen partagé, approché dans son épaisseur et ses enjeux historiques. Le colloque s’attache ainsi à éclairer l’invention et les fonctions de ce Casanova européen aux multiples facettes.

Les travaux et les discussions s’organisent autour de trois axes principaux :

  1. Casanova et l’Europe des Lumières : réseaux, circulations, idées, paradoxes ; thèmes, figures et enjeux européens dans les œuvres de Casanova.
  2. Éditer et traduire les œuvres de Casanova en Europe.
  3. Imaginaire(s) européens(s) : réceptions nationales dans l’espace européen ; usages européens de Casanova ; thèmes casanoviens dans les littératures européennes.